Pollution de l’environnement :

Devant la pollution empoisonnant son propre pays, Pékin eut l’idée d’utiliser l’intoxication chimique pour se débarrasser des Vietnamiens. Par des pressions politiques autant que financières, elle fit accepter par Hanoi l’implantation par tout le Vietnam de ses industries les plus polluantes. Déjà en 1990, après à la fin de la guerre sino-vietnamienne, de nombreux Chinois venus ou revenus au Vietnam se sont remis à faire du commerce et à ouvrir de petites entreprises en prenant des Vietnamiens d’abord comme prête-nom puis comme partenaire d’entreprise-conjointe. Même lorsqu’à partir de 2005 sont acceptées des entreprises 100% étrangères, sachant la méfiance des Vietnamiens envers la Chine, beaucoup d’entreprises 100% chinoises préfèrent se prétendre joint-ventures en s’alliant avec des cadres corrompus, et on peut dire qu’aujourd’hui la grande majorité des entreprises présentes au Vietnam ont des Chinois pour propriétairesxxii.

Profitant de l’ignorance de la population et de la carence des lois vietnamiennes, les petites unités chinoises, comme celles des Vietnamiens eux-mêmes, il faut le reconnaître, rejetaient à gogo leurs déchets dans les fleuves au grand dam des riverains. Pour Pékin ce n’était pas assez, et le pouvoir chinois se détermina à passer à la vitesse supérieure. Alors que la Chine elle-même avait fermé toutes ses usines de bauxite pour cause de dégâts environnementaux, après de multiples pressions à partir de 2001, Pékin finit en 2007 par faire signer par le premier ministre Nguyễn Tấn Dũng l’accord pour un projet de 6 usines de bauxite sur une surface de 1800 km2 concédées, à exploiter en commun par les deux pays sur les Hauts plateaux du Centre, où se trouvent les troisièmes plus riches gisements de bauxite du mondexxiii. L’emplacement des deux premiers sites choisis, à DakNong et Lâm Đồng, une fois connu, suscita pour la première fois au Vietnam communiste une levée de protestation de scientifiques, d’intellectuels et de personnalités diverses (pétition de 2600 signatures) qui évoquaient des dangers considérables pour l’environnement et partant pour les hommes et la culture des théiers et caféiers dans les alentours, sans compter, comme le remarquent les militaires, le danger d’une installation de milliers de Chinois censés être ouvriers sur le « Toit de l’Indochine »xxiv. Le gouvernement passa outre, arrêta les meneurs de la révolte, les usines furent donc mises en construction en 2009 ; et l’on interdit au peuple de s’aventurer dans leur zone comme c’est devenu la règle pour toute grande entreprise chinoise. Qu’en résulte-t-il ? Pour implanter les usines on a sacrifié des milliers d’hectares de forêts primaires et de terres de plantation, provoquant la paupérisation des habitants (des montagnards sans défense), la pénurie d’eau douce dont une bonne partie est captée pour la fabrication de l’alumine, et le risque de déversement des boues rouges hors des deux fosses où elles sont stockées à l’air libre en cas de pluie diluviennexxv. Et les travailleurs chinois y vivent toujours dans des quartiers réservés sans que l’on sache exactement leur nombre ni leur réelle fonction. Quant aux deux usines censées rapporter plein de devises au Vietnam, elles n’ont pas cessé d’être déficitairesxxvi au point qu’en 2016 le Ministère de l’industrie et du commerce a dû réclamer de l’aide gouvernementale pour remplacer les équipements chinois vieillots et inefficaces par des machines à la technologie plus avancée des autres pays.

Le summum de la duplicité et de l’inhumanité chinoise (jusqu’à présent au moins) comme de la complicité gouvernementale vietnamienne est atteint avec l’entreprise Formosa. En 2008, Pékin fit pression sur Hanoi pour que fût accordée à la Formosa Plastics group, une compagnie taiwanaise habituée des procès environnementaux, la permission d’implanter une aciérie dans la province de Hà Tĩnh au Centre Vietnam. Pour ce projet, le groupe constitua une filiale, la Hung Nghiep Formosa Ha Tinh Company, appelée simplement Formosa au Vietnam, dont les parts furent bientôt rachetées par des compagnies chinoises, ce qui fait en réalité d’elle une compagnie chinoise et non plus taiwanaise comme beaucoup encore le croient. En 2010, toujours par la concussion et l’intimidation, Formosa se fit obtenir la concession pour 70 ans de 3300 ha à Vũng Áng dans le district de Kỳ Anh, juste devant un port d’eau profonde de grande importance militaire puisque des bateaux de 50.000 DWT et des sous-marins peuvent s’y abriter. Outre cet énorme privilège (selon la loi vietnamienne en vigueur qui ne reconnaît pas la propriété foncière mais seulement l’utilisation de terrain, aucun particulier ou groupe au Vietnam ne peut se voir délivrer un permis d’utilisation dépassant 45 ans), Formosa bénéficia aussi d’une remise de taxe foncière et de taxe sur l’importation des marchandises, ce qui ne l’empêcha pas de pratiquer la fraude dans leur paiement (découverte en 2016) pour près de 300 millions de dollars, et du droit de développer les infrastructures à sa guise !

Malgré les protestations des habitants expropriés, l’usine fut mise en construction en 2012 et l’on vit surgir en 2015 sur son emplacement un immense complexe dont on peut avoir un aperçu en tapant sur Google map.

Le 6 avril 2016, alors que l’usine était à peine terminée, les habitants de Vũng Áng découvrirent sur leurs plages un nombre effrayant de poissons morts ; les jours suivants, jusqu’au 18 avril, le phénomène s’étendit sur les côtes du Centre, offrant le spectacle de kilomètres de poissons morts estimés au nombre de plusieurs millions. Cette mort de la mer qui s’avérera être la plus grande catastrophe écologique jamais vue jusqu’ici, ne suscita d’abord aucune réaction des autorités. En cherchant la cause du désastre, des pêcheurs-plongeurs détectèrent des conduites provenant de Formosa qui crachaient des jets continuels d’un liquide étrangement rouge. Commencèrent alors des manifestations dans tout le pays contre la compagnie chinoise. Les autorités vietnamiennes ne se réveillèrent que 6 semaines après l’hécatombe pour parler de catastrophe et amener Formosa à accepter sa responsabilité. Mais au lieu de fermer aussitôt l’usine et d’ordonner une enquête sur les effets de la pollution, le gouvernement se contenta d’un dédommagement de 500 millions de dollars dont la somme dérisoire par rapport aux dommages causés n’est toujours pas distribuée aux victimes au point qu’on se demande si elle a été effectivement versée et dans ce cas empochée par qui. Or, selon les quelques scientifiques venus constater les dégâts, il faudra des dizaines d’années voire des siècles pour que la mer guérisse de ces millions de m3 de liquide remplis de métaux lourds et autres produits toxiques3f (plomb, mercure, cadmium, manganèse, phénol, cyanide, etc., selon un laboratoire indépendant des autorités) que Formosa rejetait et rejette dans ses eauxxxvii. Et ce n’est plus aujourd’hui les deux provinces avoisinantes de Formosa mais toutes les quatre provinces centrales (Hà Tĩnh, Quảng Bình, Quảng Trị, Thừa Thiên – Huế) qui sont touchées et la nappe des eaux rouges continue de s’étendre et commence à gagner les côtes méridionales. Pour survivre les pêcheurs essaient d’aller chercher du poisson au grand large où ils risquent d’être abattus par les pêcheurs armés chinois et la marine chinoise qui se sont appropriés la mer orientale.

Comme si Formosa ne suffit pas, dans la même région, profitant de la saison des pluies, une vingtaine d’usines hydroélectriques détenues par les Chinois déversent sans crier gare l’eau de leur bassin sur la campagne environnante, détruisant les cultures et tuant plusieurs centaines de personnes. Ce genre d’inondations causées sciemment et souvent sans préavis par les usines hydroélectriques ont fini par susciter dans la population un sentiment de détestation envers les 7000 barrages qui produisent 40% de l’électricité nationalexxviii, que Hanoi parsème dans tout le pays à l’imitation des Chinois en Chine.

Plus grave, en pleine tempête Formosa, pour se moquer du monde, les Chinois, sous leur faux nez, la compagnie vietnamienne Hoa Sen, se firent accorder la licence pour l’implantation d’une autre aciérie d’égale ampleur à Cà Ná, province de Ninh Thuận, dans le Sud du paysxxix. Si cette usine voit le jour et se met à rejeter ses déchets dans la mer comme celle du Centre, nul doute que toutes les provinces littorales vietnamiennes deviendront inhabitables pour ses autochtones et que l’économie maritime s’effondrera complètement.

Pour parfaire la destruction du Sud, en 2008 les Chinois, via la compagnie Lee & Man, se firent accorder la construction d’une gigantesque papeterie devant produire 420 000 tonnes de papier par an sur le Sông Hậu, le grand fleuve nourricier du delta, au fi des protestations unanimesxxx. Cette usine qui entre en principe en fonction cette année tuera certainement le fleuve avec ses énormes quantités de rejets de soude et d’autres produits toxiques et ruineront riziculture comme aquaculture dans l’Ouest

A la différence d’autres entreprises étrangères, peu nocives, les entreprises chinoises installées sur tout le territoire vietnamien, sont toutes très polluantes par la nature de leurs produits et rejettent allègrement leurs déchets dans l’atmosphère, dans le sol comme dans les eaux. Lacs et rivières vietnamiens sont déjà noirâtres ou rougeâtres selon les substances qui s’y déposent. Le sol imprégné d’engrais et de pesticides contamine les récoltes. On soupçonne même la Chine d’exporter avec ou non l’agrément de Hanoi ses propres déchets toxiques au Vietnam où ils sont enfouis dans divers endroits du pays, sur la foi des témoignages de quelques complices repentis. D’ailleurs d’où Formosa tire-t-elle tant de déchets quand sur sa propre déclaration ses fourneaux ne sont pas tout à fait prêts avant 2017 ?  Quant à l’air, il ne tardera pas à être complètement irrespirable avec la mise en activité de 20 centrales thermiques à base de charbon disséminées dans le pays (un projet gouvernemental veut même élever ce chiffre de 20 à 80 centrales d’ici 2030) dont 15 appartiennent aux Chinois (directement ou indirectement par leur prêt du capital) lesquelles fonctionnent avec une technologie obsolète et des équipements hérités des centrales chinoises que Pékin veut fermer en Chinexxxi. Ce choix d’énergie fossile très polluante, provoquant brouillard et pluies acides, encouragé par Pékin, a été fait au détriment de l’énergie renouvelable, alors que le Vietnam, avec plus de 3000 km de côte venteuse accueillerait avantageusement des éoliennes.