Destruction de l’économie :

Hanoi comme Pékin devaient tenir secret le contenu du traité de 1990 par crainte de la révolte unanime des Vietnamiens, animés par suite des leçons de l’histoire d’une hostilité viscérale envers le grand voisin prédateur. Pour éviter d’avoir à faire face à 90 millions de résistants au moment de la proclamation officielle de l’annexion, et ne convoitant le Vietnam que pour ses richesses minières (en particulier bauxite et pétrole) et sa situation favorablement stratégique en Asie du Sud-Est, Pékin machina une véritable entreprise de génocide contre la population vietnamienne en vue d’un repeuplement par des Chinois, qui débuta aussitôt le traité signé. Devant la destruction méthodique de l’économie et l’empoisonnement parallèle de toutes leurs sources de vie, les jeunes Vietnamiens sont et seront poussés à émigrer, ceux qui restent seront réduits au fil des années à l’état de malades impotents et les enfants à venir destinés à naître chétifs ou difformes.

Destruction de l’agriculture :

Le Vietnam tire ses ressources principales d’une agriculture florissante qui occupe encore plus de la moitié de sa population, du produit de ses pêches, du tourisme, et aussi du pétrole (depuis 2000). La culture du riz nourricier pour lequel le Vietnam est encore jusqu’à peu le 2e producteur au monde et le 3e exportateur, fut donc la première cible de Pékin :

Le vaste delta du Mékong, grenier à riz du Vietnam, dépend des crues alluvionnaires annuelles qui lui assurent sa fertilité. Depuis la mise en activité d’une cascade de 6 barrages chinois dans le Yunnan en amont du Mékong (4 autres sont prévus, sans compter le projet de deux canaux qui détourneront dans les alentours l’eau du fleuve), en particulier les gigantesques barrages hydroélectriques de Xiaowan (capacité : 15 milliards de m3, 2010) et Nuozhadu (capacité : 23 milliards de m3, 2012), les autres pays qui vivent du Mékong assistent impuissants à la détérioration de leur économie fluviale. Ne pouvant s’en prendre au puissant chinois qui manipule les débits du fleuve à sa guise sans même prévenir les riverains et s’assoit sur les mises en garde la Commission régionale du Mékong dont il refuse de faire partie, ces pays préfèrent participer à la curée en construisant leurs propres barrages avec la bénédiction et l’apport financier de Pékin (11 prévus au Laos qui rêve d’être un grand pourvoyeur d’électricité pour la région, dont l’énorme Xayaburi sur le cours principal du fleuve, déjà en chantier ; 2 en projet au Cambodge et 2 autres en Thailande)xiii.

Le Vietnam, en aval dans le delta ne peut que constater les dégâts : en butte à des sécheresses prolongées et des crues dévastatrices, les sols s’appauvrissent faute de sédiments et à cause entre autres de la salinisation due à l’augmentation de la température et la montée des eaux de mer ; le niveau de l’eau douce baisse dangereusement jusqu’à parfois la pénurie entraînant la chute des réserves de poissons ; avec le changement de température se multiplient les insectes et les champignons qui provoquent des maladies (développement de la dengue) et détruisent les récoltesxiv. A l’action des barrages, s’ajoute la destruction des mangroves surtout dans l’extrême sud pour y élever des crevettes à l’exportation, à l’instigation des entreprises de congélation de fruits de mer pour la plupart tenues par des Chinois. Sans les arbres pour fixer la terre, les côtes s’érodent et chaque année 500 ha disparaissent. Cà Mau bientôt n’aura plus la forme de pointe.

En conséquence la superficie des rizières se réduit, et leur rendement baisse de 15% depuis une dizaine d’années ; la situation se dégrade si rapidement que l’on parle même de risque de famine dans les années à venir. Car paradoxalement, dans le Vietnam grand exportateur de riz, les habitants sont obligés souvent de manger du riz importé ; cela tient au fait  qu’une bonne partie (60%) des récoltes est préemptée par l’Etat qui l’achète à très bas prix au producteur (3000 đ/kg au lieu de 4500 đ sur le marché), pour l’exportation. Où ? en priorité (40%) vers la Chine (au prix de 6000 đ), laquelle en échange du bon riz vietnamien revend à la population vietnamienne son propre riz de mauvaise qualité, parfois mélangé de grains en plastique appelé « faux riz » à un prix double ou triple (jusqu’à 30000 đ). Exploités et découragés par les mauvaises conditions de travail, chassés d’une terre devenue aride, un nombre grandissant de paysans abandonnent le métier, émigrent en ville ou dans les pays avoisinants, abandonnant la terre aux Chinois qui s’empressent de l’acquérir.

Décidés à s’emparer du maximum de terre pour leur colonisation de peuplement, les Chinois trouvent mille astuces plus diaboliques les unes que les autres pour ruiner les paysans récalcitrants et à les pousser à abandonner leur foyer. Leur subtile cruauté trouve en la petite paysannerie pauvre d’où cupide, ignorante et crédule une proie facile :

  • Des commerçants chinois voyageant par tout le pays repèrent les paysans en difficulté et proposent de leur acheter les quatre sabots de leur buffle au prix de l’animal, ce que les pauvres hères acceptent en pensant gagner double puisque l’animal tué pour leurs sabots pourra ensuite être vendu comme viande. Le buffle étant pour le paysan son instrument de travail, celui-ci disparu, il ne restera d’autre choix au paysan que l’acquiescement à n’importe quelle suggestion du chinois : combler sa rizière pour en faire une terre pour culture vivrière ou plantation d’arbustes en utilisant des fertilisants et pesticides chinois toxiques (qui ne respectent aucune des normes internationales) que lui vend à crédit le commerçant, lequel lui promet en retour de lui acheter à bon prix le produit de sa récolte ; promesse souvent tenue au moins la première année ; ensuite, sous des prétextes quelconques (ex. le produit en question n’est plus demandé) le commerçant ou un autre de ses congénères refuse l’achat du produit, lequel devra être bradé à vil prix par le paysan, trop heureux de pouvoir écouler rapidement des matières périssables. Le paysan finalement surendetté se voit obligé de céder sa terre au chinois ou à un de ses complices pour émigrer ailleurs.

  • Autre variante : là où la région prospère grâce à une certaine culture, le commerçant offre d’acheter toutes les feuilles du tubercule (par exemple le manioc) ou de la plante, ou aussi toutes les racines de la plante, à un prix bien supérieur à la récolte elle-même ; résultat, le tubercule ne peut se développer, la plante meurt et le paysan se trouve démuni de semence ou de plantule pour la prochaine saison ; de nouveau offre de vente d’engrais et de pesticides pour la plantation d’un fruit, d’une fleur, etc. de très bon rapport, etc.. L’astuce de l’achat des racines a été utilisée pour la destruction des poivriers, une des richesses du Centre-Vietnam.

  • Toute une culture centenaire aux frontières du Cambodge, celle du palmier à sucre, est en train d’y être éradiquée « grâce » aux Chinois qui viennent proposer aux paysans d’acheter à prix fort des troncs de ce palmier ; coupés en deux le palmier ne peut que mourir et il n’est pas question d’en replanter car l’arbre ne produit qu’au bout d’une vingtaine d’annéesxv.

La volonté destructrice chinoise n’a pas de borne : Aux paysans un peu plus futés, des Chinois « experts » viennent conseiller une augmentation de revenu avec l’élevage d’une variété de bulot (pomacea), de homard d’eau douce (procambarus) ou de tortue rouge, dont la chair est en effet prisée. Or, ce sont trois espèces importées d’Amérique, terriblement invasives, qui ne tardent pas à envahir rizières, fleuves et lacs, canaux…, tuant la faune et la flore locale, en particulier les jeunes plants de riz à un degré tel que la FAO en est alarméexvi.

Mieux ou pire encore, des inconnus ont été surpris en train de jeter des bébés crocodiles dans le Mékong. Ce n’est peut-être qu’une rumeur, mais en février dernier, au vu et au su d’un millier de personnes, un bonze, « élu » même député, — connu pour avoir publiquement pris à partie Lý Thường Kiệt, le grand général vainqueur des Song dans une guerre pour la première fois offensive et non pas défensive en 1075, pour son « insolence » envers l’Empire, — certainement un agent chinois, a fait jeter dans le Fleuve rouge, sous couvert d’un rite de délivrance des âmes, dix tonnes de piranhas, de quoi infester tout le fleuve et y interdire désormais toute activité. Pouvez-vous imaginer un tel acte ? Devant l’indignation générale les autorités minimisent le fait en déclarant que les piranhas incriminés appartiennent à une variété inoffensive xvii!

Les plantations de café pour lequel le Vietnam est le 2e producteur du monde (et le 1er pour la variété robusta), ne subissent pas de destruction en règle de la part des Chinois, d’abord parce que c’est plutôt un produit d’exportation (seuls 5% servent à la consommation nationale) non indispensable à la vie de la population, ensuite parce qu’ils veulent s’en rendre maîtres : toujours à l’affût de la moindre occasion de rachat à rabais, ils comptent déjà sur la forte fluctuation du prix du café qui pousse à la ruine les planteurs incapables d’encaisser une chute brutale des cours (comme par exemple en 2012) pour ce faire.