Nouveau stratagème chinois pour légaliser le hold-up de la Mer orientale

Relayant un article du journal chinois Global Times, le très officiel journal numérique vietnamien Pháp Luật (Loi) du 21/3/2018 fait état d’une proposition d’achat de l’archipel Paracels du Vietnam au prix de 200 milliards USD émis par le général chinois Kim Nhất Nam (nom phonétisé à la vienamienne), professeur en recherche de stratégie internationale de l’armée chinoise (cf. http://luatphapso.com/trung-quoc-ngo-y-muon-dung-200-ty-usd-mua-lai-hoang-sa-cua-viet-nam.html )..

Pourquoi ce pavé dans la mare lancé par un organe officiel au moment où l’opinion publique (brimée mais non silencieuse car s’exprimant par des voies détournées) s’indigne de l’immobilisme du pouvoir face aux exactions chinoises en Mer orientale ?

1/ Les communistes au pouvoir de Hanoï avaient déjà « vendu » les archipels (Paracels et Spratly) à la Chine. Après le traité « secret » d’allégeance de 1990 à Chengdu, ils se sont entendus avec Pékin pour lui céder progressivement tout le territoire vietnamien en vue d’une annexion prévue à partir de 2020. Et tout le monde peut constater (de visu en se rendant sur place ou par la lecture des documents glanés sur internet y compris les media officiels) l’existence au Vietnam d’immenses superficies de terrain situées aux endroits les plus stratégiques sous le couvert de zones économiques où les Vietnamiens n’ont pas droit de cité, ainsi que la multiplication de quartiers voire de villes chinois où l’unique langue utilisée est le chinois et où le yuan seul a cours. Les Paracels ont été livrés aux Chinois en 1988 après un simulacre de défaite navale (en fait un massacre de marins vietnamiens non armés perpétré par les Chinois avec la complicité du pouvoir vietnamien), quant aux Spratly, depuis juillet 2017 Hanoï laisse les Chinois y régner en maître sans réagir concrètement.

2/ Malgré l’insistance de Pékin qui cherche à obtenir du pouvoir vietnamien la reconnaissance officielle du transfert à la Chine de la souveraineté sur les archipels auquel Hanoï avait consenti en échange d’une aide militaire lors des guerres du Vietnam, dont témoigne une note diplomatique de 1958 du premier ministre Phạm Văn Đồng (voir à ce sujet notre article « SOS Vietnam…), par peur de l’opprobre général et de la révolte populaire, les dirigeants vietnamiens y ont toujours rechigné, optant pour une cession tacite et des déclarations nationalistes à l’intention du peuple, attitude hypocrite consistant à ménager la chèvre et le chou.

3/ Pour rendre son hold-up sur les archipels et la mer qui les entoure acceptable devant l’opinion internationale, la Chine a besoin de le légaliser. A défaut d’un transfert de souveraineté par décision politique de la part du Vietnam, Pékin adopte maintenant la solution de l’achat, un achat plutôt fictif puisque les 200 milliards proposés ne seront pas payés, à la rigueur décomptés de la dette contractée par le pouvoir de Hanoï à son égard (la dette publique du Vietnam en 2017 est estimée officiellement à 95 milliards USD, mais la dette des entreprises garanties par l’Etat non comprise dans ce chiffre qui est de 2 à 3 fois plus élevée est faite en grande partie auprès des banques chinoises – cf. http://ndh.vn/neu-no-cong-la-431-ty-usd-ai-tra-no-cho-dnnn-thua-lo–20170602032447449p145c151.news ).

4/ La solution de la vente semble être un prétexte « présentable » à l’opinion vietnamienne pour justifier la cession des archipels. La population sait que l’Etat est en quasi-faillite et la vente pourrait passer pour une mesure nécessaire et sauver « l’honneur » du Parti au pouvoir.

5/ Comme pour la sinisation de l’écriture vietnamienne, la publicité faite à la proposition d’achat des Paracels du général chinois par un journal officiel sert de ballon d’essai auprès de la population. Selon la réaction des Vietnamiens, la vente sera effective ou écartée comme juste un simple avis personnel.

A supposer que le régime communiste de Hanoi accepte et déclare la vente, quelle légalité juridique peut donc avoir une cession sous pression devant le fait accompli du vol ? Et de quel droit un parti qui s’est imposé par la violence, qui ne représente rien d’autre que lui-même, que les citoyens n’ont pas élu (il existe bien un parlement mais avec des candidats choisis d’avance dont le peuple ne connaît rien), peut-il attenter à l’intégrité du territoire national et s’en servir comme marchandise sans que le peuple ait son mot à dire ? Nous ne vivons plus à l’époque des monarchies absolues où le souverain considère la terre et les sujets d’un pays comme sa propriété personnelle dont il peut disposer à volonté que je sache !

La comédie de l’achat-vente des Paracels ne doit donc tromper personne. Reste cependant un point positif : en élevant une proposition d’achat, le général chinois a, sans le vouloir, reconnu officiellement le droit souverain du Vietnam sur les archipels, et donc la nullité des revendications de la Chine en Mer orientale. Que voilà un bon argument pour tous ceux qui veulent contrer l’ambition hégémonique de Pékin !